La rédaction de votre journal a reçu cette semaine, dans le cadre de sa rubrique VISITE SANS FRONTIÈRE, un jeune entrepreneur. Josias Boenzemwendé Diendéré (DBJ). Titulaire d’un MBA (maîtrise en administration des affaires) en stratégie digitale, il est le promoteur d’une plate-forme dénommée Le Grand Frère. Il nous a entretenus sur les grandes lignes et sur l’avenir de son projet.
Infofrontiere : Parlez-nous de votre parcours scolaire, universitaire et professionnel.
DBJ : J’ai obtenu mon BEPC au groupe scolaire Saint-Viateur et je me suis orienté vers la série scientifique C, au lycée privé du Réveil. Après ma première, j’ai fait la terminale au lycée privé Wendsongde où j’ai obtenu le BAC D. Ensuite, est venue la grande question que tout nouveau bachelier se pose. Qu’est-ce que je fais après le BAC ? Depuis la classe de première je souhaitais faire l’architecture. Renseignements pris au Centre d’information et d’orientation scolaire, professionnel et des bourses (CIOSPB), il s’est avéré que c’est au Benin qu’il existe une école d’architecture. J’ai laissé tomber l’architecture et j’ai décidé de faire le marketing, pour aider maman dans son unité de production de jus de fruit. Quelques jours avant la rentrée, papa me conseille de faire la communication. En voilà un dilemme ! Finalement je me suis lancé en communication sans savoir ce qui m’y attendait. Au premier semestre j’en ai un peu voulu à papa, parce que je ne comprenais absolument rien. Au 2nd semestre, je me suis rendu compte que la filière commençait à me plaire et qu’elle faisait partie de ma personnalité. En 3e année il fallait choisir entre le journalisme, la communication pour le développement et la communication des organisations, et j’ai opté pour le 3e choix. Par la suite, j’ai fait une année de stage et après le stage, je me suis orienté en marketing digital à Dakar au Sénégal. Côté professionnel, actuellement je travaille en tant que chef de projet digital dans une agence de communication digitale, qui conçoit spécifiquement et exclusivement des sites web de qualité. C’est justement cette agence qui incube mon projet.
Infofrontiere : Qu’est ce qui a justifié le choix de la série C ?
DBJ : Pour dire vrai, j’ignore la raison pour laquelle j’ai fais la classe de 2nd C. Aujourd’hui avec le recul, je crois que c’est par suivisme de mes camarades qui avaient opté pour cette série. Aussi, dans mon entourage les gens semblaient accorder peu de considération à la série A. Les parents vantaient le BAC D qui selon eux, offre plusieurs opportunités. Je suis donc allé en classe de 2nde C dans l’objectif d’avoir un BAC D et ce, sans l’aide d’un conseiller en orientation. Je voulais compléter le trio du père, de la mère et du fils, tous titulaires du baccalauréat série D. Mais quand je m’y suis lancé, les difficultés se sont présentées et j’ai donc repris la classe. Mais il faut dire que je n’étais pas un élève simple non plus. (Rires)
Infofrontiere : Qu’est-ce que Le Grand Frère (LEGF) ?
DBJ : Le Grand Frère est une plate-forme d’orientation scolaire qui accompagne les nouveaux bacheliers et les lycéens, parce que je pense que la question de l’orientation ne doit pas être prise en compte à partir du BAC. Il faut que ça débute bien avant ça, c’est-à-dire qu’à partir de la 3e, il faut commencer à échanger, à discuter orientation, parce que le choix de la série détermine déjà ce que vous allez faire après le BAC. L’idée du GF, c’est de pouvoir accompagner les jeunes en général à faire un bon choix d’orientation, car même lorsqu’on s’oriente mal, la reconversion est possible. Il suffit d’avoir les informations, qui sont disponibles sur https://legrandfrere.bf.
Infofrontiere : Qu’est-ce qui a motivé la création du LEGF ?
DBJ : Tout est parti du fait qu’il fallait soutenir sur un projet pour mon master. C’est de là que le déclic est venu. A l’Institut supérieur de management (ISM) du Sénégal (où j’ai étudié), j’appréciais leur vision qui était de former des leaders et non « des demandeurs d’emploi ». C’est de là qu’est née l’idée du projet LEGF. Je me suis donc inspiré de ma propre expérience, lorsque j’avais besoin d’informations pour m’orienter dans les études. Déjà avant que j’aille en communication, j’ignorais ce que j’allais faire. J’ai fait le tour de plusieurs instituts de formation, le CIOSPB, l’université de Ouagadougou, pour avoir des informations sur leurs offres de formation, mais je n’en ai pas tiré une grande satisfaction. Je voulais quelqu’un qui allait échanger avec moi, mais on me remettait des brochures, pour me demander après si j’ai des questions. Difficile d’en poser sur quelque chose sur laquelle on n’a pas d’informations. Finalement, je me suis retrouvé à faire la communication.
Aussi, il y a mon frère qui a vécu une situation pas très intéressante en matière d’orientation. Il a débuté avec la médecine où il a fait deux ans, et s’est finalement retrouvé à faire du business, ce qui n’a rien à voir avec la médecine. Heureusement, il y trouvait son compte parce qu’il aimait ce qu’il faisait. Cependant, il a dû reprendre pendant que ces promotionnaires sont en master et lui, il est actuellement en deuxième année. Au regard de ce qu’il a vécu, je me suis dit que beaucoup de burkinabè vivent cette situation. J’ai ainsi pensé à ce projet de LEGF, afin d’orienter et donner de l’information utile et juste.
Infofrontiere : Quels objectifs recherchez-vous à travers LEGF et qui sont vos cibles ?
DBJ : J’ai appris à travers mes cours qu’un business doit travailler à répondre à un besoin. Au regard de mon expérience et de celle de mon frère, ce que je recherche principalement c’est d’abord éviter à mes jeunes frères « dans l’esprit du Grand Frère », les conséquences d’une mauvaise orientation comme le vit mon grand frère. La mauvaise orientation engendre des problèmes aussi bien pour les élèves, mais aussi pour les parents et les chefs d’entreprises. LEGF a ensuite pour objectif d’éviter aux parents d’investir inutilement de l’argent dans des formations auxquelles leurs enfants ne réussissent pas et se lassent, juste parce qu’ils ont été mal orientés. Enfin notre objectif, c’est de permettre aux chefs d’entreprise d’avoir les bons profils dans leurs entreprises parce que très souvent, ces derniers se retrouvent à recycler et former leurs employés dont les formations ne cadrent pas avec les attentes de l’entreprise. Ma cible ici ce sont les lycéens, les bacheliers, les étudiants et dans une grande mesure ceux qui estiment n’avoir pas fait le bon choix de formation ; à ces derniers je recommande une reconversion sans tenir compte du retard par rapport à leurs promotionnaires.
Infofrontiere : Est-ce que la mauvaise orientation ne vient pas des parents dont les rêves ont été brisés ?
DBJ : Les parents et les responsables d’instituts sont la cheville ouvrière de l’orientation scolaire. De plus, les enfants ont des aptitudes complètement différentes. La preuve en est que dans la même famille, on peut trouver un enfant tactile et manuel, et un autre qui préfère la stratégie et la réflexion. Je pense que les parents devraient arrêter d’imposer un choix d’orientation aux enfants. Ils doivent plutôt travailler à les observer et leur proposer des jeux ludiques afin de connaitre leur personnalité. C’est plus simple d’orienter un enfant quand on connait sa personnalité. Allant dans ce sens, je souhaite avoir des partenariats avec les associations des parents d’élèves. Les vidéos de partage d’expérience sur la plate-forme, sont faites à l’intention des parents. Un parent qui voit un professionnel d’un domaine précis ayant reçu une toute autre formation, il sera mieux aguerri et pourra bien outiller son enfant.
Infofrontiere : Quelles sont vos attentes et perspectives ?
DBJ : Ma vision est de faire du LEGF une entreprise incontournable de l’éducation au Burkina, dans la sous-région, en Afrique et partout dans le monde. Le site web a été lancé officiellement en mi-juillet. Nous avons 3000 impressions et autour de 250 à 300 clics. Parlant d’étape, j’ai pu collecter au moins 150 instituts et universités publiques comme privées au Burkina Faso. En plus je suis dans la dynamique de collecter les formations de ces instituts et là je suis actuellement à 3000 formations, correspondantes à une vingtaine d’établissements. Il reste encore plus d’une centaine à collecter. La prochaine étape sera de finaliser cette collecte et de passer à la collecte des informations liées au lycée, surtout ceux professionnels. J’avoue qu’il y a beaucoup de limites, mais également d’énormes défis.
Infofrontiere : Un mot à l’endroit des futurs bacheliers ?
DBJ : Le premier conseil est qu’ils doivent enlever de la tête que c’est après le BAC qu’il faut chercher ce qu’on doit faire à l’université. Dès la classe de seconde ou de première, il faut commencer à réfléchir sur ce que vous allez faire après le BAC. La preuve est que certains ont une très bonne moyenne au BAC et vont postuler pour la bourse. C’est après avoir pris connaissance des conditions de la bourse qu’ils se rendent compte qu’il leur fallait de meilleures notes en seconde ou en première. En plus de la recherche de l’information, ils devraient penser à faire des stages d’immersion, ne serait-ce que pour observer, car l’observation est un aspect important. Le dernier conseil que j’ai à leur donner, c’est que si quelqu’un à une vision, il doit se donner les moyens d’y parvenir en allant vers l’information et trouver tout ce qu’il faut pour réussir. Tout simplement oser, parce qu’on n’apprend pas tout à l’école. Aller sur le terrain fait connaitre plusieurs choses et permet d’apprendre beaucoup plus. Un grand merci aux partenaires qui m’aident énormément, notamment ADAGE, et aux mentors qui me soutiennent (depuis Dakar et à Ouaga).
La rédaction (Infofrontiere)
Serge Ekra DELAFAURCE
Rédacteur en Chef
C’est très innovant et porteur. Bon vent au projet. Sa permettra aux élèves de faire de meilleurs choix et de ne pas tomber dan les regrets et les reprises de classes a l’Université.